"A Alger, je me sens algérois et je me comporte comme tel. Aujourd'hui à Brême, je me sens Brêmois et je me comporte comme un Brêmois, mais je garde toujours à l'esprit que je suis d'abord le fils de mon père et originaire de la terre de mes ancêtres, qui n'est ni à Alger ni à Brême".

Mourad Mebarek

Pour le Kabyle, l'Algérie est aussi sa patrie. Si l'Etat l'appelle pour assumer des devoirs, il assumera la responsabilité du rôle familial pour protéger la famille, la tribu et la région et pour construire des œuvres communautaires. Sa nation est et restera l'Algérie. Il voit sa patrie dans son père, à l'intérieur de L'Hara au milieu de la Djemâa, dans son village. Il reste enraciné dans son existence à l'endroit où ses ancêtres ont vécu, même si, en tant que citadin, il est loin de sa tribu. Cette fil conducteur, Mourad l'a suivi dans toutes les situations de sa vie. Il l'a vécu et on a retrouvé ces idées dans ses actes.


2004_guelaa_1_.jpg

C'est en pleine guerre d'Algérie, le 9 février 1957, que Mourad, deuxième fils de la famille Mebarek, est né à Alger. Son père occupait une fonction de cadre au ministère de l'éducation, sa mère s'occupait avec amour de la grande famille. Comme les grands-parents vivaient aussi à la maison, Mourad passait beaucoup de temps avec son grand-père. Pendant les vacances d'été, ils partaient souvent ensemble à Guelâa et y passaient tout l'été. A l'âge de 20 ans, Mourad voulait connaitre autre chose. Son objectif était l’Europe. Au lieu de prendre la voix la plus facile vers la France, il a choisi l'Allemagne. Son premier point de chute fut Prien am Chiemsee en Bavière. Il y a appris l'allemand au Goethe Institut, mais dans la vie de tous les jours, il entendait parler bavarois. Pendant deux ans, il a exploré le sud de l'Allemagne, puis est arrivé à Brême en 1979 un peu par hasard pour commencer ses études d'architecture. Mourad a ensuite entamé des études post-universitaires à la l’école des Beaux-Arts de Hambourg, en se spécialisant dans l'urbanisme, et a obtenu son diplôme en 1989. Dans ce travail, il a pu réunir deux de ses passions : l'urbanisme et le village de ses ancêtres Guelâa. C'est là qu'il a tourné, avec son camarade d'études Sattar Abbas, un film sur son village. Dès cette époque, Mourad a réussi à éveiller l'intérêt des habitants pour une prise de consciente du patrimoine culturel de Guelâa. De 1990 à 2010, il a exercé son métier d'architecte dans un bureau à Osterholz-Scharmbeck.

Entre-temps, les choses avaient évolué. En 1980, Mourad s'est tout de même lancé un défi français et a rencontré sa femme Nathalie. Avec respect et considération l'un pour l'autre, ils ont vécu ensemble leurs différentes cultures. En 1985, ils ont emménagé dans la maison du 63 Karlshafener Straße. Au début, cela n'avait rien d'extraordinaire, mais avec le temps, la Karlshafener Straße en Allemagne est devenue pour Mourad ce que son village Guelâa Beni Abbas était en Algérie. En 1987, Salah a suivi son grand frère à Brême. La famille s'est agrandie avec la naissance de leurs deux enfants, Louisa et Mounir.

Mourad a toujours gardé des liens avec l'Algérie et sa famille durant toutes ces années et se rendait en Algérie régulièrement, parfois avec sa famille, parfois sans elle. Une visite à Guelâa faisait toujours du programme. La proximité avec son village s'est accrue au fil des années et il a réussi à éveiller l'intérêt général pour Guelâa.

Mourad Mebarek est décédé le 6 août 2012, après trois ans de maladie. L'idée directrice qu'il a suivie dans les projets les plus divers continue cependant à exister.